La Cour de cassation tient le cap sur la jurisprudence concernant l'appel en matière d'exception d'incompétence.

Cette décision me paraît cohérente et conforme au texte.

Il était d'ailleurs prévisible que la jurisprudence de la Cour de cassation aille en ce sens.


Pour la Cour de cassation (Cass. 2e civ., 2 juill. 2020, n° 19-11.624) :

« 5. Il résulte des articles 83, 84 et 85 du code de procédure civile, dans leur rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, que, nonobstant toute disposition contraire, l’appel dirigé contre la décision de toute juridiction du premier degré se prononçant sur la compétence sans statuer sur le fond du litige relève, lorsque les parties sont tenues de constituer un avocat, de la procédure à jour fixe et qu’en ce cas, l’appelant doit saisir, dans le délai d’appel, le premier président de la cour d’appel en vue d’être autorisé à assigner l’intimé à jour fixe.

  1. L’application de ces textes spécifiques à l’appel d’une ordonnance d’un juge de la mise en état statuant sur la compétence du tribunal de grande instance se fonde sur la lettre et la finalité de l’ensemble du dispositif, dont l’objectif, lié à la suppression du contredit, était de disposer d’une procédure unique et rapide pour l’appel de tous les jugements statuant sur la compétence.
  2. L’application de ces dispositions, sanctionnées par la caducité de l’appel, sauf cas de force majeure, ne pouvait être exclue pour une partie représentée par un avocat, professionnel avisé. En outre, ces dispositions poursuivent un but légitime au sens de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, en l’occurrence la célérité et l’efficacité de la procédure d’appel des jugements statuant sur la compétence sans se prononcer sur le fond du litige, la compétence du juge appelé à connaître d’une affaire pouvant être définitivement déterminée dans les meilleurs délais. Elles ne portent pas une atteinte disproportionnée à l’accès au juge d’appel, un rapport raisonnable de proportionnalité existant entre les moyens employés et le but visé.
  3. Dès lors, ayant relevé que les sociétés appelantes, qui ne se prévalaient d’aucun moyen pris d’un risque d’atteinte portée à leur droit à un procès équitable, ne s’étaient pas conformées à ces prescriptions, c’est à bon droit que la cour d’appel a prononcé la caducité de leur déclaration d’appel.
  4. Le moyen n’est donc pas fondé.
    PAR CES MOTIFS, la Cour :
    REJETTE le pourvoi ; »

Au-delà de la solution, attendue, c'est la rédaction de l'arrêt qui est intéressant.

Depuis peu, la Cour de cassation ne se contente plus de donner sa solution comme s'il s'agissait d'une évidence.

Elle fait davantage dans la pédagogie.

Elle semble expliquer pour quelles raisons sa décision va dans le sens donné : L’application de ces textes spécifiques à l’appel d’une ordonnance d’un juge de la mise en état statuant sur la compétence du tribunal de grande instance se fonde sur la lettre et la finalité de l’ensemble du dispositif, dont l’objectif, lié à la suppression du contredit, était de disposer d’une procédure unique et rapide pour l’appel de tous les jugements statuant sur la compétence.

Je trouve cela vraiment intéressant.

Serait-ce l'impulsion donnée depuis le changement relativement récent de présidence à la deuxième chambre ? Car il ne vous aura pas échappé qu'il y a eu un changement de présidence, Madame Flise ayant été remplacée par Monsieur Pireyre. Sauf erreur, cela devait être en fin d'année dernière.

Et comme elle en a pris l'habitude aussi, elle tape sur l'avocat, en lui rappelant qu'il est un professionnel avisé. Et c'est vrai !

Et s'il est avisé, il ne doit pas se tromper sur les règles de procédure... ou alors, il a conscience de ses limites, et il s'adjoint les compétences d'un confrère ou une consœur qui connaît les règles.

Est-ce une volonté de la Cour de cassation de rappeler à nous autres, professionnel avisé, que nous devons rester dans notre domaine de compétence ?

Je veux le voir de cet oeil, mais c'est parce que je ne suis pas du tout, mais alors pas du tout, objectif sur la question !

Auteur: 
Christophe LHERMITTE