C'est sur un moyen relevé d'office que la Cour de cassation casse l'arrêt d'une cour d'appel qui s'est estimée compétente pour statuer sur une irrecevabilité de l'appel contenu dans des conclusions régularisées avant le dessaisissement du magistrat de la mise en état.

Alors que ce moyen n'était pas invoqué dans le cadre du pourvoi, la Cour de cassation, au visa de l'article 914 du Code de procédure civile, retient que "pour déclarer l'appel irrecevable, l'arrêt retient que l'irrecevabilité de l'appel a été soulevée par des conclusions remises au greffe antérieurement au dessaisissement du conseiller de la mise en état et qu'elle est donc compétente pour statuer sur ce moyen", et que "en statuant ainsi, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le texte susvisé".(Civ. 2e, 20 avril 2017, n° 16-12605, Publié au bulletin).

 

Le conseiller de la mise en état est, lorsqu'il est désigné et jusqu'à son dessaisissement, seul compétent pour déclarer l'appel irrecevable. Les parties ne sont plus recevables à invoquer l'irrecevabilité de l'appel après son dessaisissement à moins que la cause ne survienne ou ne soit révélée postérieurement.

Il n'appartient donc pas à la cour d'appel, sauf si la cause survient ou est révélée postérieurement au dessaisissement du magistrat de la mise en état, de statuer sur une irrecevabilité de l'appel qui est de la compétence exclusive du conseiller de la mise en état.

La cour d'appel ne pouvait donc prononcer l'irrecevabilité de l'appel. Mais pouvait-elle renvoyer l'affaire à la mise en état pour que le conseiller de la mise en état se prononce ? Ou devait-elle alors déclarer irrecevable si ce moyen de procédure n'était pas contenu dans des conclusions adressées au conseiller de la mise en état ? Ou devait-elle nécessairement renvoyer devant le magistrat de la mise en état si l'irrecevabilité était développée dans des conclusions adressées au conseiller de la mise en état ?

Mystère. Nous n'avons pas assez d'éléments pour que les questions trouvent un élément de réponse. J'ai bien quelques idées sur la question, mais attendons de voir l'évolution de la jurisprudence sur ces points.

 

Après, que va-t-il se passer devant la Cour de renvoi ?

L'intimé va reprendre son moyen de procédure, qui sera soumis au magistrat de la mise en état, lequel pour déclarer l'appel irrecevable. Cette ordonnance sur déféré sera susceptible, puis, si l'irrecevabilité est déclarée, faire un pourvoi... lequel pourvoi développera les mêmes moyens que ceux soutenus à l'occasion du premier pourvoi.

Il ne restera plus qu'à expliquer au justiciable qui risque de rester hermétique à cette explication.

Il pourra lui être répondu qu'il a fait avancer la jurisprudence en procédure civile, et que nous sommes toujours friands de ce genre de décision... même si en pratique, leur intérêt n'est pas évident...

Tout ça pour ça ! comme dirait Lelouche.

Auteur: 
Christophe LHERMITTE