C’est un arrêt intéressant qui est rendu ici par la Cour de cassation.

Un appelant fait un premier appel.

Il se rend compte que son appel est irrégulier, n’ayant pas saisi la bonne juridiction d’appel qui n’était pas la cour d’appel de Paris mais celle de Versailles.

L’appelant se rattrape, et fait appel devant la cour d’appel compétente.

Et l’intimé lui tombe dessus, au motif que l’appelant n’a qu’une seule cartouche qui lui faut utiliser correctement dès le premier coup.


On comprend que l’intimé se prévaut de la jurisprudence de la Cour de cassation qui, au visa de l’article 546 du CPC (l’intérêt), a considéré que l’appelant, faute d’intérêt (art. 546) ne peut faire un appel tant que la caducité n’a pas été constatée… sachant que lorsqu’elle est constaté il est toujours irrecevable à faire appel au regard de l’article 911-1.

La Cour de cassation refuse d’étendre sa jurisprudence sur la caducité à l’irrecevabilité, est c’est une bonne chose (Cass. 2e civ., 1er oct. 2020, n° 19-11.490) :

« Vu les articles 546 et 911-1, alinéa 3, du code de procédure civile :
4. Il résulte du premier de ces textes, selon lequel le droit d’appel appartient à toute partie qui y a intérêt, que la partie qui a régulièrement saisi une cour d’appel d’un premier appel formé contre un jugement n’est pas recevable à réitérer un appel du même jugement contre le même intimé. Selon le second de ces textes, la partie dont l’appel a été déclaré irrecevable n’est plus recevable à former un appel principal contre le même jugement et à l’égard de la même partie.
5. Il en découle que la saisine irrégulière d’une cour d’appel, qui fait encourir une irrecevabilité à l’appel, n’interdit pas à son auteur de former un second appel, même sans désistement préalable de son premier appel, sous réserve de l’absence d’expiration du délai d’appel, tant que le premier appel n’a pas été déclaré irrecevable.
6. Pour déclarer irrecevable l’appel présenté par M. X… devant la cour d’appel de Versailles, l’arrêt relève qu’il ressort des actes de la procédure suivie par M. X…, qu’après avoir formé appel le 10 octobre 2017 à l’encontre du jugement du conseil de prud’hommes dans l’instance l’opposant à la société Chabé devant la cour d’appel de Paris, ce salarié présentait un même recours contre la même décision, dès le lendemain, devant la cour d’appel de Versailles et que le 17 janvier 2018, son avocat écrivait à la cour d’appel de Paris que « la saisine de votre juridiction étant une erreur, dont je vous prie de bien vouloir m’excuser, je vous remercie de bien vouloir en tirer toutes les conséquences concernant cette déclaration d’appel.
7. L’arrêt en déduit qu’ayant omis de se désister de cet appel devant la cour d’appel de Paris avant d’avoir formé un nouvel appel devant la cour d’appel de Versailles et alors qu’une même partie ne peut interjeter qu’un seul recours contre une même décision, M. X… n’avait pas intérêt à former, le 11 octobre 2017, un second recours contre le jugement déféré en laissant subsister son premier appel.
8. En statuant ainsi, alors qu’elle constatait, d’une part, que le premier appel avait été formé devant la cour d’appel de Paris, dans le ressort de laquelle n’est pas situé le conseil de prud’hommes de Nanterre, de sorte qu’il était irrégulier et, d’autre part, que cette irrégularité n’avait donné lieu au prononcé d’une irrecevabilité que postérieurement à la formation du second appel porté devant la cour d’appel de Versailles, celle-ci a violé les textes susvisés.
»

Il aurait été assez sévère de sanctionner un appelant qui s’aperçoit de son erreur et la corrige.

Mais cette possibilité de rattraper est limitée.

Car si l’appel est effectivement déclarée irrecevable, c’est l’article 911-1 qui prend le relais, étant souligné que cette disposition ne distingue pas les motifs d’irrecevabilités de l’appel.

Il convient de distinguer les effets de la caducité de ceux de l’irrecevabilité.

Même si cela revient un peu au même, à savoir que la procédure se termine, et que l’avocat doit se rapprocher de la Société de Courtage des Barreaux pour leur dire qu’il a eu une ptit problème, il n’en demeure que sur le plan procédural, c’est bien différent.

La fin de non-recevoir qu’est l’irrecevabilité, n’est pas l’incident d’instance qu’est la caducité.

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Auteur: 
Christophe Lhermitte