On peut s'étonner que la Cour de cassation ait à se prononcer assez souvent sur des notions que l'on peut qualifiier de basiques en procédure, comme l'est la nullité.

Mais si elles sont d'apparences simples, ces notions sont plus compliquées qu'elles n'y paraissent, et la frontière est souvent ténue entre nullité, pour irrégularité de fond, et irrecevabilité. Et la frontiè§re n'est du reste pas vraiment étanche, et les deux se côtoient.

Une simplification serait certainement la bienvenue, pour essayer de fusionner le tout. Mais la tâche n'est certainement pas aisée. Alors, en attendant, on fait avec !

Cet arrêt est l'illustration de cette relation entre irrecevabilité et nullité (Cass. 2e civ., 15 avr. 2021, n° 19-25.449) :

« Vu l’article 114 du code de procédure civile :

6. Il résulte de ce texte que le défaut de mention dans un acte de procédure de l’organe représentant légalement la personne morale constitue un vice de forme, la nullité de cet acte étant subordonnée à la preuve d’un grief que le juge doit constater.
7. Pour déclarer irrecevable l’action du syndicat et dire n’y avoir lieu d’examiner les demandes au fond, l’arrêt retient que la requête à fin d’assignation à jour fixe et l’assignation délivrée par le syndicat sont nulles en ce qu’elles ne portent pas mention de la personne ou de l’organe le représentant.
8. En se déterminant ainsi, sans constater le grief subi par la société, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé.
»

Ce n'est pas une solution nouvelle, la cour de cassation s'étant prononcée, et même récemment, sur cette question.

La thèse n'était pas idiote.

La personne morale agit par son organe représentatif. Donc, pas d'organe, pas de possibilité d'agir. Nous sommes alors sur une défaut de capacité à ester, et donc une irrégularité de fond, cause de nullité de l'acte, voir une défaut de qualité ce qui aboutit à une irrecevabilité.

Mais la cour de cassation déplace sur la nullité, pour vice de forme.La personne morale avait capacité à ester, n'étant pas en liquidation judiciaire par exemple.

Elle disposait d'un droit d'agir.

Mais le problème est qu'elle n'avait pas précisé comment elle pouvait effectivement agir.

Par conséquent, ce qui manque est la mention de cet organe, pas l'existence de cet organe, lequel existait. Il en aurait été différemment s'il n'y avait plus d'organe, auquel cas, la personne morale avait comme une peit problème...

La position de la Cour de cassation me paraît donc cohérente, et conforme au texte.

Mais pour autant, décider le contraire aurait certainement pu être accepté. La solution n'est donc pas si évidente que cela, et rien ne garantit que la solution ne changera pas. D'où l'importance de ne pas se planter.

Enfin, s'agissant d'ue nullité de forme, il faut justifier d'un grief.

Et alors, là, le grief, c'est pas le truc le plus facile à trouver !

En pratique, un grief est constitué lorsque la partie n'a pas pu exercer un recours dans son délai, ou d'une manière faire diligence dans un délai déterminé, comme conclure ou se faire représenter.

Auteur: 
Christophe Lhermitte