Les clauses de conciliation préalable obligatoires fournissent un contentieux relativement fournis.

Et depuis l'arrêt de la chambre mixte de décembre 2015, la Cour de cassation ne cesse de leur laisser une place de plus importante.

Et cet arrêt du 16 novembre 2017 (Civ. 3e, 16 nov. 2017, n° 16-24642, Publié au bulletin), trouvera sa place dans cette jurisprudence.

L'arrêt du 16 novembre 2017 dont il est question est le suivant :

 

Attendu que, pour déclarer recevable la demande du maître de l'ouvrage contre l'architecte, l'arrêt retient que l'article G10 du cahier des charges générales du contrat d'architecte, qui stipulait qu' « en cas de litige portant sur le respect des clauses du présent contrat, les parties conviennent de saisir pour avis le conseil régional de l'ordre des architectes dont relève l'architecte, avant toute procédure judiciaire, sauf conservatoire », n'instituait pas une procédure de conciliation obligatoire préalable à la saisine du juge, mais prévoyait simplement qu'une demande d'avis devait être adressée au conseil régional des architectes et que la fin de non-recevoir pouvait être régularisée en cours d'instance ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le moyen tiré du défaut de mise en oeuvre de la clause litigieuse, qui instituait une procédure de conciliation, obligatoire et préalable à la saisine du juge, constituait une fin de non-recevoir et que la situation donnant lieu à celle-ci n'était pas susceptible d'être régularisée par la mise en oeuvre de la clause en cours d'instance, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

 

Il a pu être enseigné aux étudiants que la clause devait être explicite.

Or, en l'espèce, la clause était rédigée en ces termes « en cas de litige portant sur le respect des clauses du présent contrat, les parties conviennent de saisir pour avis le conseil régional de l'ordre des architectes dont relève l'architecte, avant toute procédure judiciaire, sauf conservatoire ».

Il n'est pas question de conciliation, mais d'avis.

Qu'à cela ne tienne, la Cour de cessation estime que cet avis obligatoire valait conciliation préalable obligatoire.

Au passage, mais cela n'est pas nouveau, relevons que cette clause apparaissait dans le cahier des charges, pas dans le contrat proprement dit.

Mais cela, la Cour de cassation l'avait déjà admis il y a peu, à propos d'architectes si a mémoire ne me fait pas défaut.

L'absence de régularisation n'est pas non plus une nouveauté puisque c'est précisément le sens de l'arrêt de la chambre mixte de décembre 2015 (revenant en cela sur la jurisprudence de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation).

Ici, c'est la lecture qui est faite de cet article qui retient l'attention.

 

Un conseil donc : faire preuve de beaucoup de prudence. Même si les termes conciliation ou médiation ne sont pas mentionnés, ce n'est pas pour autant que nous ne sommes dans le cadre d'une conciliation ou médiation préalable obligatoire.

Il en va donc de la responsabilité des avocats, et donc des primes d'assurance.

Et ces primes augmentent déjà suffisamment avec les problèmes de procédure, ce qui ne va pas aller en s'arrangeant avec le décret de mai 2017.

 

Mais cette jurisprudence se comprend.

Les tribunaux craquent. Il faudrait donc déjudiciariser (mot inconnu du dico, je sais).

Avec une telle position, il est évident que les conciliation et médiations vont décoller.

Les plus tordus de nos confrères, ou à tout le moins des juristes, pourraient avoir la bonne idée d'insérer de telles clauses un peu partout dans les contrats, ce qui permet de disposer d'une irrecevabilité à soulever si ce qui sera l'adversaire omet cette conciliation ou médiation préalable avant de saisir le juge étatique.

Et comme en plus cette clause n'a pas nécessairement à mentionner le terme conciliation ou médiation, ça vaut le coup d'y penser...

 

 

Auteur: 
Christophe LHERMITTE