?Les audiences de déféré sont aussi intéressantes que frustrantes (partie 2)
On y découvre les problèmes de procédure des uns et des autres, et c’est toujours intéressant.
Mais on aimerait parfois intervenir, et ça c’est frustrant ?
Récemment, j’écoutais les plaidoiries de confrères dans un incident d’irrecevabilité d’appel.
Et là, je me dis qu’il était rageant pour l’appelant de s’être pris les pieds dans le code en voulant bien faire.
?L’appelant fait un premier appel. L'acte contient une erreur mineure, qu’il décide de corriger par une seconde DA, le même jour. Jusque là, todo va bene.
L’appelant remet ses conclusions au greffe, dans le délai 908, mais en mentionnant un seul RG, celui de la DA n° 2.
Et là ! ? le CME déclare caduque la première DA.
L’appelant ne fait rien, et poursuit sur sa seconde DA, sans déférer l’OCME.
L’intimé se saisit du problème - mal mais ça passe quand même - en soutenant l’irrecevabilité au visa de l’article 911-1.
Pour l’intimé, la DA n° 2 n’est pas rectificative, ce serait un second appel, irrecevable.
L’intimé, à mon avis, a tort. Le CME aussi (surtout) a eu tort de déclarer la DA caduque.
Cependant, l’appelant, qui n’avait pas fauté, a mal réagi suite à l’erreur du CME.
Sa DA était soit irrecevable soit rectificative, auquel cas elle ne produisait aucun effet si ce n’est celui de corriger la DA n° 1.
Peu importe que les conclusions aient été remises sur un mauvais RG. Le RG, on s’en fout : l’appelant avait remis ses conclusions au greffe dans le délai de 3 mois, et ça suffisait.
Il aurait dû déférer l’OCME de caducité car le CME s’est planté !
Malheureusement, en ne le faisant pas, et comme la DA n° 2 s’incorpore à la DA n° 1, alors tout tombe !
?C’est rageant car l’appelant, en voulant bien faire, s’est emmêlé les crayons.
Mais pour quelle raison n’a-t-il pas déféré cette ordonnance ? Et comment un CME a-t-il pu prononcer une caducité alors que l’appelant avait conclu ?
Il y a de la JP (au moins 3 arrêts publiés sur cette question, sauf erreur), qui permet de comprendre qu’il suffit à un appelant de faire diligence, peu importe le numéro de RG apparaissant sur l’acte de procédure, même si l’acte a suivi le mauvais chemin et n’a pas atterri dans le bon dossier.
L’intimé obtiendra confirmation de l’ordonnance, même s’il continuait de plaider que la DA n° 2 n’était pas rectificative en invoquant 911-1.
?Ou alors, la cour d’appel, sur déféré, pourrait soutenir que le moyen d’irrecevabilité n’est pas le bon, à savoir 911-1. Et comme il existe un principe de concentration des moyens d’irrecevabilité, l’intimé deviendrait irrecevable à soulever le bon moyen d’irrecevabilité. Ca vaut ce que ça vaut, mais c’est peut-être ce que l’appelant malheureux aurait pu/dÜ soutenir pour tenter de sauver sa procédure.

Auteur: 
Christophe Lhermitte