Il y a peu, c'est ma collaboratrice qui m'avait interpellé sur cette question... que, je l'avoue, je ne m'étais jamais posée.

Mais il est vrai aussi qu'au sein du cabinet, ce n'est pas moi qui traite ce type d'affaire.

Cet arrêt de la Cour de cassation oblige à nous interroger s'il est opportun, dans l'intérêt du client, de demander au juge conciliateur la désignation d'un notaire afin qu'il établisse un projet d'état liquidatif du régime mat'.

En effet, dans ce cas, si c'est intéressant financièrement pour l'officier public, ça l'est peut-être un peu moins pour les parties car ce notaire peut prétendre à une rémunération à ce titre.

C'est en ce sens que se prononce la Cour de cassation dans un arrêt, publié, du 12 janvier 2017 (Civ. 2e, 12 janv. 2017, n° 16-11116, Publié au bulletin) :

 

 

Vu l'article 255, 10°, du code civil et les articles 5 et 5-1 du décret du 8 mars 1978, tel que modifié par le décret du 16 mai 2006, relatif au tarif des notaires, dans sa rédaction antérieure à l'article 10 du décret n° 2016-230 du 26 février 2016 ; 

Attendu que lorsque le juge commet un notaire sur le fondement du premier de ces textes, aux fins d'élaboration d'un projet de liquidation du régime matrimonial, le notaire a droit, en application de l'article 5-1 du tarif, à un émolument proportionnel tel que fixé au tableau I, n° 63 E, de l'annexe de ce tarif alors applicable ; 

Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel, que M. B..., notaire, a été désigné par un juge aux affaires familiales, saisi de la procédure de divorce engagée entre M. X... et son épouse, sur le fondement de l'article 255, 10°, du code civil, aux fins d'élaboration d'un projet de liquidation du régime matrimonial des époux et de dépôt d'un rapport ; que l'épouse a contesté, devant le premier président, le montant de la rémunération de M. B... fixé selon le tarif des notaires ; 

Attendu que, pour réduire la rémunération accordée au notaire, l'ordonnance énonce que le premier juge a fait application du taux prévu par l'article 23 du décret du 8 mars 1978, en violation des dispositions de l'article 5 de ce décret qui dispose que la rémunération du notaire commis par justice pour effectuer une mesure d'instruction ou pour remplir une mission ne comportant pas la rédaction d'un acte compris dans le tarif est fixée et perçue comme en matière d'expertise ; que la rémunération du notaire commis en qualité d'expert doit donc être fixée par application de l'article 284 du code de procédure civile qui dispose que le juge fixe la rémunération de l'expert en fonction notamment des diligences accomplies, du respect des délais et de la qualité du travail fourni ; 

Qu'en statuant ainsi, alors que le notaire, qui avait établi un projet d'état liquidatif, avait droit à un émolument proportionnel, le premier président a violé les textes susvisés ; 

PAR CES MOTIFS : 

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 30 novembre 2015, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ladite ordonnance et, pour être fait droit, les renvoie devant le premier président de la cour d'appel d'Agen ;

 

Cet arrêt est rendu sous les anciennes dispositions.

Il semblerait que sous le nouveau tarif, au regard de l'article A. 444-83 du Code de commerce pour "l'élaboration d'un projet de liquidation du régime matrimonial" (numéro 42 du tableau 5) donne lieu à un émolument selon le barème suivant" :

 

TRANCHES D'ASSIETTE TAUX APPLICABLE
De 0 à 6 500 € 2,564 %
De 6 500 € à 17 000 € 1,058 %
De 17 000 € à 60 000 € 0,705 %
Plus de 60 000 € 0,529 %

 

 

Faut-il donc demander cette désignation ?

Je laisse à ceux qui pratiquent la matière, s'ils le désirent, nous faire part de leurs positions et précisions sur cette question que je ne maîtrise pas.

 

Edition du 26 janvier 2017 : Pour un commentaire plus avisé que le mien, je renvoie à l'article dans Dalloz Actualités.

Il en ressort qu'il faut bien distinguer dans quelles conditions intervient le notaire. S'il s'agit d'élaborer un projet d'état liquidatif dans le cadre de 255 10°, le notaire ne peut se considérer comme expert.

La conséquence est que son intervention relève du tarif, sans qu'ils puissent prendre des honoraires.

Disons-le sans ambages, c'est un problème de sous, le notaire ayant intérêt à se dire "expert" pour demander des honoraires qui seront plus élevés que le tarif. A ceux qui pratiquent la matière, il pourra être dans l'intérêt du client de vérifier qu'il n'y ait pas une erreur, et que soit respectée la solution donnée ici par la Cour de cassation.

Auteur: 
Christophe LHERMITTE