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La question a pu se poser de la possibilité pour une partie irrecevable à conclure au fond, de régulariser de nouvelles conclusions après que l'appelant ait à nouveau conclu.

Une ordonnance de la Cour d'appel de Rennes, ayant admis cette possibilité, avait donné lieu à un article dans la Gazette du Palais, au demeurant cité en bibliographie sus l'article 909 du Code de procédure civile : Gaz. Pal. 9-11 juin 2013, p. 11, Négligence de l'intimé et nouvelles conclusions de l'appelant : quelle rigueur dans la nouvelle procédure d'appel ? Faut-il sanctionner l'appelant diligent ?

La Cour de cassation apporte une réponse, par une décision cependant non publiée (Cass. civ. 2e, 29 janvier 2015, n° de pourvoi: 13-28019 13-28020, Non publié au bulletin), dont l'attendu est le suivant :

"Mais attendu qu'ayant constaté que par arrêt du 28 mai 2013, la cour d'appel avait dit n'y avoir lieu à déféré l'ordonnance du conseiller de la mise en état qui déclarait irrecevables les conclusions de Mme Y... signifiées le 16 novembre 2012 au motif que le délai pour conclure prévu par l'article 909 du code de procédure civile n'avait pas été respecté, ce dont il ressortait que l'irrégularité des premières conclusions de Mme Y... la privait de la possibilité de conclure à nouveau, la cour d'appel a par ces seuls motifs légalement justifié sa décision ;"

le délai pour conclure prévu par l'article 909 du code de procédure civile n'avait pas été respecté, ce dont il ressortait que l'irrégularité des premières conclusions de Mme Y... la privait de la possibilité de conclure à nouveau

C'est précisément la thèse qui était celle de l'auteur de l'article susvisé. C'est d'ailleurs celle qui paraissait la plus conforme au texte et à l'esprit de la réforme.

Qui a loupé son délai pour conclure reste dans les vestiaires jusqu'à la fin du match

Les procédures en cours, dans lesquelles la partie a pu profiter de la clémence d'un magistrat de la mise en état en admettant des conclusions pourtant irrecevables, sont donc entachées d'une irrégularité.

L'appelant bénéficie de ce faux cadeau fait à l'intimé, et pourra le moment venu faire choix de se pourvoir en cassation, sur la base de ce moyen de procédure, si l'arrêt au fond lui est défavorable.

L'intimé se trouve donc sanctionné à retardement. Les conclusions sauvées étaient donc une victoire à durée provisoire, qui au final se retournera contre lui.

Il n'est donc pas toujours bon de gagner, si c'est pour mieux perdre ensuite...

Auteur: 
Christophe LHERMITTE

Commentaires

Bonjour Maître,

Bonjour Maître,

J'ai gagné en 1ere instance prudhommales, et suis reconnu comme "licenciement sans causes reeles et sérieuses" et la société est condamnées à me versé 21.000 € de Dommages et Intérets.

Elle a fait appel et mon avocat a conclu en retard....., les conclusions ont été refusées....(il y avait rien de bien nouveau , comme dans les conclusions de la sociéte)

Quid de mes chances de ganger en appel ? Quid de prendre la parole moi -meme et/ ou mon vocat le jour de l'audience ? Quid du paiment si je perd en appel (il ferait marcher son assurance m as dit mon avocat) ?

Merci beaucoup de votre retour sur me demande

Bien cordialement,

william

Mon Cher Confrère,

Mon Cher Confrère,

J'ai lu avec attention vos réponses très instructives aux nombreuses questions sous votre publication.

Je suis de l'équipe qui restera au vestiaire lors d'une audience prochaine car j'ai signifié tardivement mes conclusions d'intimé et d'appel incident (ce qui est rageant quand on a gagné en première instance mais je faisais appel car ma demande reconventionnelle avait été rejetée). Il m'avait été suggéré, lors de la fixation et avant la côture de déposer de nouvelles conclusions d'intimé pour demander uniquement la confirmation du jugement et sans faire d'appel incident mais j'ai désormais bien compris en vous lisant que celà n'était pas envisageable au risque de créer un nouvel incident et une condamnation à un article 700 de mes clients.

J'ai en revanche lu que vous pensiez préférable de ne pas se présenter à l'audience de plaidoirie. Pourriez-vous m'expliquer pourquoi vous pensez celà ? Je n'ai en effet aucune envie d'y aller mais je craignais que de ne pas le faire serait mal perçu par la Cour, un peu comme du "je-m'en-foutisme".

À vous lire et en vous remerciant vivement pour votre partage de connaissances ! 

Très belle journée !

VBD

Portrait de Christophe Lhermitte

Ma chère consoeur,

Ma chère consoeur,

Certains confrères, consoeurs, irrecevables à conclure, prennent des conclusions très courtes pour seulement demander la confirmation. Je pense que l'intérêt est purement psychologique, ou pour démontrer que même si on s'est planté, on connaît la jurisprudence de la Cour de casation et la rédaction de l'article 954 issue de cette jurisprudence.

Mais en pratique, cela ne présente strictement aucun intérêt, et ne donne pas davantage de droits à la partie sanctionnée.

Mais l'avocat se dit que comme ça, il y a quand même des conclusions dans le dossier. J'vous l'dis, c'est psychologique !

Je ne le conseille pas pour cette raison.

Eventuellement, un courrier peut être adressé pour informer la cour le cas échéant que vous ne serez pas présent à l'audience, et pour rappeler (au cas où) l'article 954 in fine qui prévoit que l'intimé est réputé s'approprier les motifs du jugement. Mais ça, je crois que tout le monde le sait et sauf erreur, on ne voit pas (plus) de cassation pour ce motif.

Quant à se présenter à l'audience, cela dépend de plein de choses.

En off, je conseille parfois aux confrères de tenter le coup à l'audience, en remettant les pièces pourtant irrecevables. Et encore cette semaine, dans une cour d'appel extérieure, le confrère à qui je l'avais conseillé, m'a précisé que cela n'avait posé aucune difficulté... comme une lettre à la poste...

Dans ces cas-là, une présence à l'audience peut être opportune.

Dans le cas contraire, une absence est préférable, ce qui évite que les confrères et consoeurs présents dans la salle aient connaissance de cette difficulté à laquelle vous avez été confrontée. C'est juste pour sauver la face. Ainsi, personne ne saura si l'irrecevabilité n'est pas du au fait que votre client ne vous a pas donné de nouvelles par exemple...

Si vous ne vous déplacez pas, écrivez à la cour pour lui dire que compte tenu du contexte, vous ne serez pas présente. Les cours d'apel le comprennent très bien.

Et si la cour entend relever un moyen d'office, elle devra demander vos explications quand bien même vous n'aurez pas été présente (et même si vous êtes irrecevables à conclure).

Très belle journée à vous également,

CL

Mon Cher Confrère,

Mon Cher Confrère,

Merci infiniment d'avoir pris le temps de me répondre.

Je doute que la lettre passe aussi facilement à la poste parisienne ! :-)

Je vais donc suivre vos conseils avisés et écrire un mot à la Cour pour l'informer de mon absence à l'audience et faire un micro rappel de l'article 954.

Je vous souhaite un bel été ! 

Noémie

Mon Cher Confrère,

Mon Cher Confrère,

Figurez-vous que dans mon dossier évoqué avec vous il y a quelques jours, je viens de recevoir des nouvelles conclusions et pièces de l'appelant. Pensez-vous que je puisse y répondre ? J'ai bien vu que l'arrêt de la Cour de cassation que vous évoquez ni est pas favorable mais peut-être que les choses ont un peu évolué depuis et que je pourrais invoquer le principe du contradictoire ?

À vous lire,

Bonne journée ! 

Noémie

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