Voici un arrêt important, sur une point sur lequel j'ai déjà conclu devant la cour d'appel, sans avoir nécessairement résussi à convaincre (Cass. 2e civ., 20 oct. 2022, n° 21-16.907, Publié au bulletin) :

« Vu l’article 910-4 du code de procédure civile :
5. Selon ce texte, à peine d’irrecevabilité, relevée d’office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l’ensemble de leurs prétentions sur le fond. Néanmoins, et sans préjudice de l’alinéa 2 de l’article 802, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l’intervention d’un tiers ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.
6. Pour fixer à la somme de 920 000 euros la créance de la société Allianz Iard dans la procédure collective de la société Demax, l’arrêt retient que dans des conclusions du 24 février 2020, la société Allianz Iard sollicitait la confirmation du jugement frappé d’appel, ce qui emportait condamnation financière de la société Demax alors que la procédure collective la concernant a été ouverte le 29 janvier 2019, mais qu’avant que la cour ne statue, dans ses dernières écritures du 21 octobre 2020, elle a opportunément ajusté sa demande pour solliciter uniquement la fixation de la créance dans la procédure collective, ce qui tend à la même prétention que celle initialement formulée, sauf à tenir compte de l’élément juridique nouveau et en déduit que l’irrecevabilité ne sera pas retenue.
7. En statuant ainsi, alors que la demande de fixation de la créance de la société Allianz Iard constituait une prétention, qu’elle n’était pas destinée à répliquer aux conclusions de l’appelant ni à faire juger une question née, postérieurement aux premières conclusions, de la révélation d’un fait, la procédure collective et la déclaration de créance de la société Allianz Iard étant antérieures aux premières conclusions déposées par celle-ci, la cour d’appel, qui ne pouvait que déclarer irrecevable cette prétention, a violé le texte susvisé.
»

Nous nous garderons bien de critiquer cet arrêt qui me semble couler de source.

Une demande de fixation n'est pas une demande condamnation. Ce sont des prétentions distinctes.

En conséquence, cette prétention qui tend à la fixation de la créance est enfermée dans le délai pour conclure, obligeant à concentrer ses prétentions.

Ce n'est que si la cause de cette demande est postérieure au délai qu'il sera possible de modifier la prétention, et de modifier la demande de condamnation en une demande de fixation.

Il est donc prudent de vérifier toute éventuelle procédure collective non seulement au moment de la rédaction de l'acte d'appel, mais également au moent de la remise et notification des conclusions, et d'adapter en conséquence les prétentions, faute de pouvoir le faire ultérieurement.

Cette décision est donc extrêmement importante, étant relevé que les redressements et liquidations judiciaires sont loin d'être un cas d'école.

Le RCS et le BODACC sont vos amis, alors utilisez les !

Auteur: 
Christophe Lhermitte