La subtilité de la procédure la rend passionnante.

Malheureusement, cette subtilité peut être difficile à saisir, et c’est cette incompréhension qui amène des avocats à introduire des incidents dénués de sens, par une mauvaise lecture.

Et la difficulté pourrait être réglée si ces incidents ne trouvaient pas écho auprès des juges d’appel.

Mais tout comme les avocats, les magistrats ne sont pas véritablement formés à la procédure d’appel, et on leur en demande peut-être beaucoup, à savoir maîtriser la matière de fond et maîtriser les règles de procédure.

De plus en plus, je me dis que les cours d’appel devraient avoir des magistrats dont l’activité dominante pourrait être la procédure, ce qui leur permettrait d’être béton.

Ce serait un peu ce que nous retrouvons en cassation, avec une deuxième chambre qui règle les questions de procédure. ET on voit bien, même si on n’est pas toujours d’accord avec la solution retenue, que c’est du haut vol, et qu’il y a une pleine cohérence entre les arrêts rendu.

Tout ça pour vous parler d’un arrête, redondant car la solution a déjà été donnée (Cass. 2e civ., 30 sept. 2021, n° 20-16.746) :

« 8. Il résulte de la combinaison des articles 562 et 954 alinéa 3 du code de procédure civile, dans leur rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, que la partie qui entend voir infirmer des chefs du jugement critiqué doit formuler des prétentions en ce sens dans le dispositif de ses conclusions d’appel.
9. Il résulte de ces textes, dénués d’ambiguïté, que le dispositif des conclusions de l’appelant doit comporter, en vue de l’infirmation ou de l’annulation du jugement frappé d’appel, des prétentions sur le litige, sans lesquelles la cour d’appel ne peut que confirmer le jugement frappé d’appel. Cette règle poursuit un but légitime, tenant au respect des droits de la défense et à la bonne administration de la justice.
10. Cette sanction, qui permet d’éviter de mener à son terme un appel irrémédiablement dénué de toute portée pour son auteur, poursuit un but légitime de célérité de la procédure et de bonne administration de la justice.
11. Par ailleurs, cette règle ne résulte pas de l’interprétation nouvelle faite par la Cour de cassation dans un arrêt du 17 septembre 2020 (2e Civ., 17 septembre 2020, pourvoi n° 18-23.626), imposant que l’appelant demande dans le dispositif de ses conclusions, l’infirmation des chefs du dispositif du jugement dont il recherche l’anéantissement ou l’annulation du jugement. Il en résulte que cette règle n’entre pas dans le champ du différé d’application que cet arrêt a retenu en vue de respecter le droit à un procès équitable.
12. Ayant relevé qu’elle ne pouvait statuer qu’au vu des prétentions émises dans le dispositif des conclusions de M. [G] et constaté que, dans le dispositif de ses dernières conclusions, ce dernier s’était borné à solliciter l’infirmation du jugement frappé d’appel, sans réitérer les chefs du jugement qu’il entendait critiquer, c’est, dès lors, à bon droit, que la cour d’appel a confirmé le jugement.
13. Le moyen n’est, dès lors, pas fondé.
»

Il faut faire une distinction entre le dispositif qui ne contient pas une demande d’infirmation ou d’annulation, et celui qui ne contient aucune prétention.

Dans ce dernier cas, les conclusions ne déterminent pas l’objet du litige.

Je l’ai déjà dit : ce n’est pas nouveau.

Lorsque l’appelant devait conclure dans le délai de quatre mois de son appel, à peine de radiation (qui privait l’appel de son effet suspensif), il était exigé de lui qu’il régularise des conclusions qui déterminent l’objet du litige. Si ces conclusions n’étaient pas des « conclusions au fond », alors la radiation était encourue.

C’est la même solution qui est retenue ici, même si les conséquences ne sont pas tout à fait les mêmes puisque c’est une caducité qui sanctionne aujourd’hui ce manque de diligence. Avec l’ancien 915, et son alinéa 3, la cour d’appel pouvait juger l’affaire sur les seuls conclusions de première instance : un strict appel réformation comme on le redoute.

Auteur: 
Christophe Lhermitte