La frontière est parfois ténue entre défaut de qualité, qui est une fin de non-recevoir aboutissant à une irrecevabilité, et le défaut de capacité, qui est une irrégularité de fond qui conduit à la nullité de l'acte.

Et avec ce fameux article 2241 du Code civil, nous avons parfois intérêts à nous placer sur le terrain du défaut de qualité plutôt que sur celui du défaut de capacité.

En l'espèce, une assignation est délivrée à la requête d'une personne décédée.

La Cour de cassation, après avoir rappelé que "constitue une irrégularité de fond affectant la validité de l'acte le défaut de capacité d'ester en justice", précise que "l'acte délivré au nom d'une personne décédée et comme telle dénuée de la capacité d'ester en justice est affecté d'une irrégularité de fond", ajoutant que "peu important que le destinataire ait eu connaissance de ce décès" (Civ. 2e, 18 oct. 2018, n° 17-19249, Bull. civ.).

Ce n'est pas la première fois que la Cour de cassation qualifie ainsi le décès de la partie (Civ. 2e, 13 janv. 1993 ; Civ. 2e, 27 juin 2002).

La Cour ajoute cependant un élément, à savoir la connaissance de ce décès par le destinataire de l'acte.

Cela importe peu.

Cet élément avait son importance, car il s'agissait d'aboutir à la nullité de l'acte de signification du jugement fait à la requête de la partie décédée, et alors que tout le monde avait connaissance de ce décès, les ayants-droits étant intervenus en cours d'instance.

Nul besoin d'aller chercher plus loin. La seule connotation que l'acte est fait à la requête de la personne décédée rend l'acte nul pour irrégularité de fond.

La connaissance de l'irrégularité contenue dans un acte de procédure ne suffit pas à couvrir cette irrégularité.

La solution peut paraître sévère puisque la partie a effectivement eu connaissance de la décision par cette signification, quand bien même elle a été faite à la requête de la partie dont tout le monde savait qu'elle est décédée.

Mais pour autant, une solution autre aurait aussi ouvert une brèche à la discussion.

La procédure doit être appliquée strictement, au regard des textes, et sans qu'elle soit affecté par des éléments de faits qui remettraient en question la nécessaire rigueur dans l'application des règles de procédure.

 

Pour aller plus, il ressort que l'appel à la requête d'une partie décédée serait nul, pour irrégularité de fond.

Reste à savoir comment couvrir cette irrégularité pour l'appelant, et pour l'intimé, de savoir comment exploiter au mieux cette irrégularité.

 

Edition du 31 octobre 2018 :

Un commentaire de cet arrêt non publié, par Jérémy Jourdan-Marques, est disponible sur Dalloz Actualités.

Auteur: 
Christophe LHERMITTE