S'il est aisé de prouver l'envoi d'un message et sa remise au greffe de la cour d'appel, il peut devenir assez épineux de prouver le contenu de cet envoi.

C'est la problématique à laquelle a été confronté un appelant dans cette affaire qui a donné lieu à cet arrêt publié (Cass. 2e civ., 21 févr. 2019, n° 18-10.907).

L'appelant démontrait bien, par la production des avis électroniques, la réception des messages, dans son délai 908, par le greffe. Mais il lui était reproché de ne pas apporter la preuve que les documents joints étaient effectivement les conclusions attendues.

Et nous pouvons comprendre l'embarras de l'appelant...

La Cour de cassation apporte une solution que nous pourrions qualifier de bon sens :

« Vu les articles 748-3, 908, 930-1 du code de procédure civile et 5, 7 et 8 de l’arrêté du 30 mars 2011 relatif à la communication par voie électronique dans les procédures avec représentation obligatoire devant les cours d’appel ;

Attendu qu’en application de l’article 930-1 susvisé, la remise au greffe de la cour d’appel des conclusions devant avoir lieu, à peine de caducité, dans le délai prévu par l’article 908 susvisé, est accomplie par la voie électronique ; qu’il résulte de l’article 748-3 susvisé, ainsi que des articles susvisés de l’arrêté du 30 mars 2011, que cette remise est faite par l’envoi, via le réseau privé virtuel avocat (RPVA), d’un courrier électronique, auquel est joint un fichier contenant ces conclusions et dont la réception par le greffe est attestée par un avis généré automatiquement par le dispositif technique du système de messagerie justice ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que l’association SPA Montpellier Méditerranée métropole (l’association) a relevé appel du jugement d’un conseil de prud’hommes l’ayant condamnée à payer diverses sommes à Mme Y ; qu’elle a déféré à la cour d’appel l’ordonnance du conseiller de la mise en état constatant la caducité de la déclaration d’appel, faute de remise au greffe par l’appelante de ses conclusions dans le délai prévu par l’article 908 du code de procédure civile ;

Attendu que pour confirmer cette ordonnance, l’arrêt retient qu’il ne résulte ni du message adressé le 4 mai 2017 au greffe de la cour d’appel par l’avocat de l’appelante via la messagerie du RPVA, ni des deux accusés de réception du même jour renvoyés par le greffe via la même messagerie, que les conclusions de l’appelante étaient jointes à son message, qu’à cet égard, l’avocat de l’appelante ne peut tirer aucune démonstration à partir des seules mentions « signification.pdf – SPA Y Ca.pdf » figurant sur son message et les accusés de réception délivrés par le greffe et ce, d’autant moins, que ses seules conclusions figurant sur la messagerie du RPVA sont celles qu’il a remises au greffe le 8 juin 2017, soit au-delà du délai de trois mois ;

Qu’en se déterminant ainsi, sans rechercher le contenu des pièces jointes au message électronique que l’appelante démontrait avoir remis au greffe par la production d’un avis électronique de réception émanant du serveur de messagerie du greffe, alors qu’il ressort des productions que ce message électronique indiquait adresser notamment les conclusions de l’appelant, la cour d’appel, qui n’a pas mis la Cour de cassation en mesure d’exercer son contrôle, n’a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 22 novembre 2017, entre les parties, par la cour d’appel de Montpellier ; remet, en conséquence la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Montpellier, autrement composée ; »

 

La Cour de cassation instaure une espèce de présomption au profit de l'expéditeur.

Le message indiquait envoyer des conclusions, et cela présume l'envoi, et la réception, de cet acte de procédure.

Et si le conseiller veut relever la caducité au motif que ce document n'était pas les conclusions, il lui appartient de rechercher quel était le contenu des pièces.

Saluons cet arrêt qui sera immanquablement commenté.

 

Auteur: 
Christophe LHERMITTE

Commentaires

Le greffe a la possibilité de:
- refuser le message (il ne s'en prive pas en général)
- d'envoyer un message pour demander les conclusion manquantes ou dire qu'elles ne sont pas jointes

La présomption c'est le bon sens comme pour les lettre AR