En l'espèce, une partie forme un appel.

Mais cet appel est déclaré irrecevable, comme n'ayant pas été effectué devant la bonne juridiction, étant précisé que nous sommes dans le cadre de l'article L 442-6 du Code de commerce qui prévoit des règles particulières avec pour seule cour d'appel compétente celle de Paris.

L'appelant réitère donc son appel, cette fois devant la Cour d'appel de Paris.

C'est alors que lui est opposé l'article 528-1 du CPC qui dispose que la partie qui a comparu est irrecevable à former un recours à titre principal passé un délai de deux ans.

La Cour de cassation montre son désaccord avec les conseillers parisiens qui avaient déclaré l'appel irrecevable, en restant que que "en statuant ainsi, alors qu'elle relevait que la société ADP avait, dans les deux ans suivant son prononcé, interjeté un premier appel du jugement qui lui était déféré, la cour d'appel a violé le texte susvisé" (Civ. 2e, 17 mai 2018, n° 17-14291, Bull. civ.).

L'arrêt est publié.

 

Nous ne pouvons que nous interroger sur l'avenir de cette jurisprudence publiée, au regard du nouvel article 911-1 du CPC qui prévoit désormais que "La partie (...)  dont l'appel a été déclaré irrecevable n'est plus recevable à former un appel principal contre le même jugement et à l'égard de la même partie".

De plus, nous pouvons aussi nous interroger sur un précédent arrêt, assez rigoureux, qui avait estimé que l'irrecevabilité d'une déclaration de saisine donnait force de chose jugée au jugement de première instance (Civ. 2e, 19 oct. 2017, Bull. civ.), qui démontre donc que la Cour de cassation a voulu limiter la portée de son arrêt à la seule déclaration d'appel, non à la sanction de l'irrecevabilité.

 

Il n'est pas certain que cette jurisprudence survive à la règle selon laquelle l'irrecevabilité d'un appel ferme définitivement la voie de l'appel.

Cela peut poser difficultés en cette matière très particulière, imposant de saisir la Cour d'appel de Paris.

D'un autre côté, nous voyons souvent que l'acte de signification du jugement ne mentionne pas la Cour d'appel de Paris comme juridiction compétente.

Ainsi, le défendeur peut saisir une juridiction incompétente, ou plus exactement qui n'a pas le pouvoir juridictionnel de se prononcer sur cet appel.

Si l'appelant forme appel devant la mauvaise cour d'appel, qui est pourtant celle indiquée, faut-il que son appel qui sera nécessairement irrecevable lui ferme définitivement la voie de l'appel ?

Cela pourrait être de nature à inciter celui qui signifie à mentionner une cour d'appel autre que celle de Paris.

Attendons donc de savoir ce que décidera la Cour de cassation dans le même cas de figure, lorsque l'article 911-1 se sera invité dans le débat.

Auteur: 
Christophe LHERMITTE