Le désistement doit être manié avec précaution, car il emporte des effets qui ne sont pas anodins.

Mais la Cour de cassation sait faire montre de clémence, et peut admettre qu'un désistement ne vaut pas nécessairement acquiescement au jugement et donc renonciation à la voie de recours.


Pour une raison dont nous n'avons pas l'explication, une partie régularise deux appels successif du même jugement.

Il a dû appuyer deux fois sur "entrer" par mégarde.

Pour une raison tout aussi inexpliquée, l'appelant renonce à l'un de ses appels, et s'en désiste.

Et c'est là que les choses sont compliquées pour notre appelant.

En effet, et j'aurais fait même chose, l'intimé a soutenu que le désistement valait acquiescement, et donc renonciation aux voies de recours.

En conséquence, tout tombait.

Mais la Cour de cassation sauve notre appelant qui a cru bien faire (Cass. 2e civ., 17 sept. 2020, n° 19-15.254) :

« Vu les articles 403 et 409 du code de procédure civile :

  1. Selon ces textes, l’acte de désistement d’appel mentionnant être accompli en vue de la formation d’un nouveau recours, s’il n’emporte pas acquiescement au jugement et renonciation à l’exercice de ce recours, n’en produit pas moins immédiatement son effet extinctif d’instance.
  2. Pour déclarer irrecevable le second appel de M. Y, l’arrêt retient qu’aux termes des dispositions de l’article 403 du code de procédure civile, le désistement de l’appel emporte acquiescement au jugement et qu’en se désistant de son appel interjeté par déclaration du 28 février 2018, M. Y a ainsi expressément acquiescé au jugement en cause, ledit acquiescement emportant, conformément aux dispositions de l’article 409 du code de procédure civile, soumission aux chefs de celui-ci et renonciation aux voies de recours.
  3. En se déterminant ainsi, alors qu’en l’état des deux appels successifs du même jugement formés par M. Y et de son désistement du premier appel, dont elle devait rechercher s’il ne mentionnait pas avoir été accompli en vue de la formation d’un nouveau recours, la cour d’appel a privé sa décision de base légale.
    PAR CES MOTIFS, sans qu’il y ait lieu de statuer sur la première branche du moyen, la Cour :
    CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 28 février 2019, entre les parties, par la cour d’appel de Montpellier ;

    »

Il est donc possible de ses désister si ce désistement est accompli en vue de la formation d'un nouveau recours.

Ne serions-nous pas davantage dans le cadre du désistement d'un acte de procédure, davantage que comme un désistement d'instance ?

Alors, je comprends davantage la décision.

Sinon, c'est tout de même faire une lecture très particulière d'un article 403 qui nous dit que "le désistement de l'appel emporte acquiescement au jugement".

D'une manière générale, il sera déconseillé de régulariser un désistement en appel, car rien ne garantit que la jurisprudence ira toujours dans ce sens tant elle paraît tout de même discutable.

Il y a peut-être un autre moyen que de régulariser un désistement.

Dans quelle mesure les deux appels ne peuvent pas être maintenus, en prévoyant une jonction ?

Donc, conseil : maniez le désistement avec précaution car c'est de la nitro (encore que la nitroglycérine n'explose pas aussi facilement que H.-G. Clouzot nous l'a fait croire dans le salaire de la peur).

Et ne faut-il pas se pencher vers le désistement d'un acte de procédure, notion que l'on ne trouve jamais en pratique et qui pourtant pourrait être bien utile. Ainsi, une partie qui renonce à un incident pourrait de désister de ses conclusions d'incident, ce qui évitera au CME d'avoir à s'arracher les cheveux sur le comment faire en pareille circonstance...

Auteur: 
Christophe LHERMITTE