L'article 125 du Code de procédure civile dispose que :

Les fins de non-recevoir doivent être relevées d'office lorsqu'elles ont un caractère d'ordre public, notamment lorsqu'elles résultent de l'inobservation des délais dans lesquels doivent être exercées les voies de recours ou de l'absence d'ouverture d'une voie de recours.

C'est sur ce fondement de cet article que la Cour de cassation a censuré la Cour d'appel d'appel ayant omis de relever d'office l'irrecevabilité de l'appel alors que la voie de recours n'était pas ouverte au regard de l'intérêt du litige inférieur à 4000 euros (Soc. 15 janv. 2014, n° 12-25.404, Bull. civ.) :

Vu les articles 125 du code de procédure civile, R. 1462-1 et D. 1462-3 du code du travail ;

Attendu que les juges doivent relever d’office les fins de non-recevoir d’ordre public lorsqu’elles résultent de l’absence d’ouverture d’une voie de recours ; que n’est pas susceptible d’appel le jugement qui statue sur une demande, quel que soit le fondement allégué, tendant à l’allocation d’une somme d’argent dont le montant est inférieur au taux du dernier ressort ;

En soi, cet arrêt ne pose rien de nouveau.

Il permet juste de s'interroger sur la portée d'un autre arrêt, rendu récemment par la Cour de cassation (Cass. civ. 2e 17 octobre 2013 N° 12-21.242) :

Mais attendu que les consorts D... E...et G..., qui n'ont pas usé de la faculté que leur confère l'article 914 du code de procédure civile de saisir le conseiller de la mise en état d'une demande tendant à faire constater la caducité de l'appel pour tardiveté des conclusions des appelantes, ne sont pas recevables à invoquer ce grief devant la Cour de cassation ;

L'article 125 du Code de procédure civile ne contient pas une liste exhaustive des relevés d'office, comme le démontre l'emploi du terme "notamment".

La caducité de la déclaration d'appel n'est pas, certes, une fin de non-recevoir (voir sur la caducité l'article de la Gazette du Palais).

Cependant, l'irrecevabilité des conclusions sur le fondement de l'article 909 du Code de procédure civile l'est incontestablement. Or, il est probable que l'arrêt de la Cour de cassation du 17 octobre 2014 vaut tant pour la caducité de la déclaration d'appel que pour l'irrecevabilité des conclusions.

Alors même que cette caducité de la déclaration d'appel (CPC, art. 908) et l'irrecevabilité des conclusions (CPC, art. 909) doivent être relevées par le conseiller de la mise en état, la Cour de cassation ne sanctionne pas la cour d'appel ne l'ayant pas relevé d'office.

Un sort différent est donc fait entre les nouvelles sanctions issues du décret dit "Magendie" du 9 décembre 2009, et les sanctions que l'on qualifiera de plus traditionnelles.

Il apparaît pourtant que dès lors que le magistrat de la mise en état devait relever d'office la caducité de la déclaration d'appel et l'irrecevabilité des conclusions, il s'agissait d'un moyen d'ordre public qui pouvait être élevé pour la première fois devant la Cour de cassation.

Il n'en est rien.

Pour la nouvelle procédure d'appel, l'arrêt d'appel purge les irrégularités.

Cela posera d'autant plus la question de la responsabilité de l'avocat d'appel qui aura oublié de soulever une caducité de déclaration d'appel ou l'irrecevabilité de conclusions.

En voulant parfois faire preuve de confraternité, l'avocat peut alors se mettre en difficulté à l'égard de son client (voir pour le problème de la responsabilité du conseil omettant de soulever un moyen de procédure). Il ne pourra plus invoquer ce moyen dans le cadre d'un pourvoi.

Cette jurisprudence de la Cour de cassation incite à conseiller d'être particulièrement vigilant quant à la régularité de la procédure de son confrère et néanmoins adversaire.

 

Auteur: 
Christophe LHERMITTE

Commentaires

L'arrêt du 17 Octobre 2013 est pour le moins surprenant en ce qu'il établit alors une hiérarchie entre les différents moyens d'ordre public : certains moyens d'ordre public sont recevables pour la première fois devant la Cour de Cassation lorsque d'autres ne le sont pas.

Quelle est la raison objective qui pourrait expliquer que l'intimé peut exciper de l'inobservation du délai d'appel pour la première fois devant la Haute Cour mais que cette faculté lui est interdite s'agissant de l'inobservation du délai de dépôt de conclusions de l'appelant ? Est -ce à dire que la Cour de Cassation considère que le non-respect du délai de notification des conclusions de l'appelant serait moins attentatoire à l'ordre public que la méconnaissance du délai d'appel ?