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Qui suit assidument le blog sait qu'un récent décret de procédure, du 11 mars 2015, impose de préciser dans la requête, la déclaration ou l'assignation, "les diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige".

On comprend qu'il s'agit d'éviter le procès, pour privilégier le règlement amiable du différend... qui a du mal à trouver sa place.

Depuis, nous intégrons une petite formule magique dans nos actes d'assignation, histoire de respecter cette nouvelle obligation procédurale.

Voilà pour restituer un peu le contexte.

Maintenant, on entre dans le vif du sujet.

Qui s'est posé la question de ces nouvelles dispositions aux procédures d'appel ?

et qu'en est-il de cette disposition en appel ?

Pas moi, je l'admets volontiers. Et pas davantage les auteurs dont j'ai pu lire les quelques mots ici ou là quant à cette réforme de procédure.

Mais certains ont réfléchi à la question, et en sont arrivés aux conclusions que je vous livre ici.

 

Dans "déclaration d'appel", il y a "déclaration".

Ah ah ! s'est exclamé fièrement un confrère auquel rien n'a échappé ! C'est donc comme dans l'article 58 modifié qui prévoit désormais in fine que "Sauf justification d'un motif légitime tenant à l'urgence ou à la matière considérée, en particulier lorsqu'elle intéresse l'ordre public, la requête ou la déclaration qui saisit la juridiction de première instance précise également les diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige".

Il n'en fallait pas davantage pour que notre brillant et prudent confrère actualise ses actes d'appel, considérant devoir désormais indiquer, dans sa déclaration d’appel, les diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige.

Et pour appuyer cette modification, et préciser quelle serait le risque d'un oubli, il est rappelé que l’article 901 du Code, qui renvoie à 58, prévoit une nullité.

Ainsi, le défaut de mention serait sanctionné par... LA NULLITE !

Ouf ! sauvée de peu cette procédure d'appel, sans cette vigilance appuyée !

 

Et maintenant, que vais-je faire dans mes procédures ?

Suivre les précautions de ce confrère, tout en étant vexé de ne pas y avoir songé plus tôt ? Ben oui, c'est ainsi, je peux me vexer pour ça... je sais, c'est pas bien, mais j'y travaille.

Que nenni ! Et vous vous en doutez bien dès lors que ce message a trouvé sa place dans les perles de la procédure.

 

Notre confrère prudent a perdu de vue que les rédacteur du décret de procédure avaient pris soin de préciser que cette déclaration, qui doit indiquer ces diligences, est celle "qui saisit la juridiction de première instance".

A ma connaissance, une cour d'appel n'est pas une juridiction de première instance.

Et cela s'explique aisément.

Lorsque l'on en vient à saisir une juridiction d'appel, c'est que le différend est déjà bien entamé.

Exiger encore que les parties se rapprochent pour parvenir à un accord tournerait à l'obsession. Devons-nous rappeler que l'absence de réconciliation des parties n'est pas considérée comme un échec par les juges, et l'accord ne constitue pas l'objectif à atteindre*.

Et puis, surtout, quand les parties en sont au stade de l'appel, c'est qu'elles ont déjà fait un passage devant une juridiction de première instance... qui a été saisie soit par assignation, soit par déclaration, soit par requête... bref, que ces diligences au sens des articles 56 et 58 ont été précisées en leur temps.

 

Pour la sanction supposée, c'est tout de même le pompon ! Alors que l'acte de première instance n'encourt pas la nullité, il en irait différemment de l'acte d'appel ?!?

Le raisonnement m'échappe.

Que vient faire là-dedans l'article 901 ?

Il renvoie certes à l'article 58 mais pour préciser que doivent être mentionnés "Pour les personnes physiques : l'indication des nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance du demandeur", "Pour les personnes morales : l'indication de leur forme, leur dénomination, leur siège social et de l'organe qui les représente légalement", "L'indication des nom, prénoms et domicile de la personne contre laquelle la demande est formée, ou, s'il s'agit d'une personne morale, de sa dénomination et de son siège social", ainsi que "L'objet de la demande".

Il ne renvoie pas à des dispositions dont le rédacteur a pris soin de prévoir qu'elles concernent la première instance, et ce fort logiquement.

 

Bon, c'est bien d'y avoir pensé, mais ces déclarations d'appel complétées de telles mentions inutiles risquent de faire sourire... moi le premier, je l'admets. Mais c'est pas méchant.

Donc, ne changez rien à vos actes d'appel...

 

 

* Petite digression pour dire que cela me fait penser à un film remarquable, Le procès de Viviane Amsallem, dans lequel on voit bien à quel point le divorce est vu comme un échec pour le tribunal religieux, de sorte que tout est bon pour remettre ensemble des époux, ce qui constitue l'objectif à atteindre, coûte que coûte...

Auteur: 
Christophe LHERMITTE

Commentaires

Bonjour,

L'article 58 nouveau (article 19 du décret du 11 mars 2015) prévoit le recours à un MARC préalablement à saisine de la "juridiction de première instance" et non d'appel.

D'où l'importance attachée à la formation continue !

(çà c'est une perle de la procédure :))