Je livre cet arrêt sur lequel il y aurait certainement beaucoup à dire.

C'est avec intérêt que je prendrai connaissance des commentaires qui seront faits de cet arrêt de cassation dont les termes sont les suivants (Civ. 2e, 5 janvier 2017, n° 15-27953, Publié au bulletin) :

Vu les articles 77 et 80, ensemble les articles 5 et 49 du code de procédure civile ;

Attendu que pour trancher l'exception d'incompétence soulevée dans l'affaire dont il est saisi, le juge statue, si nécessaire, sur les questions de fond dont dépend sa compétence ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Moët Hennessy Diageo (la société MHD) ayant dénoncé le contrat aux termes duquel elle confiait à M. X... la mission de promouvoir auprès de sa clientèle ses produits, son image et son savoir-faire, celui-ci l'a assignée devant un tribunal de commerce pour se voir reconnaître le statut d'agent commercial et avoir paiement d'une indemnité ; que ce tribunal ayant accueilli l'exception d'incompétence soulevée par la société MHD, qui se prévalait d'une clause attributive de compétence au profit d'un autre tribunal de commerce, M. X... a formé un contredit contre ce jugement ;

Attendu que pour faire droit au contredit et renvoyer les parties devant le tribunal de commerce initialement saisi, la cour d'appel retient que la compétence de la juridiction doit être analysée au regard du statut que revendique M. X... qui a précisément saisi la juridiction parce qu'il contestait la qualification de son contrat et sa qualité de commerçant qu'il déniait, de sorte qu'on ne peut pas en l'état, lui opposer la clause attributive de compétence, alors que la preuve de sa qualité de commerçant n'est pas encore rapportée, et qu'appliquer cette clause serait préjuger de la nature du contrat le liant à la société MHD ;

Qu'en statuant ainsi, sans trancher la question de fond dont dépendait la compétence, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; 

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 novembre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Riom ;

Pour se prononcer sur la compétence, le juge doit trancher la question de fond, même si cela revient en définitive à porter une appréciation sur le fond de l'affaire.

Mais de toute façon, la décision qui tranchera cette question de fond n'aura autorité de chose jugée que sur la question de la compétence ? Pas si sûr. La question de la qualification du contrat sera tranchée, et s'imposera au juge qui sera amené à juger le fond de l'affaire.

Décision intéressante, qui mérite d'y réfléchir pour bien en comprendre la portée. Pour ma part, j'attends donc les commentaires qui ne manqueront pas d'arriver.

 

Edition du 24 janvier 2017 :

Pour le commentaire, je renvoie à celui de Corinné Bléry dans Dalloz actualités 

Et j'ai donc ma réponse sur l'autorité de la chose jugée concernant la question de fond tranchée :

"Par ailleurs, selon l’article 95, « lorsque le juge, en se prononçant sur la compétence, tranche la question de fond dont dépend cette compétence, sa décision a autorité de chose jugée sur cette question de fond » : c’est un (rare) cas d’autorité de la chose jugée positive (J. Héron et T. Le Bars, op. cit., n° 368 ; J. Héron, « Localisation de l’autorité de la chose jugée ou rejet de l’autorité positive de la chose jugée ? » in Mélanges R. Perrot, Dalloz, 1995, p. 131 ; T. Le Bars, Autorité positive et autorité négative de chose jugée, Procédures 2007, Étude 12)"

Auteur: 
Christophe LHERMITTE

Commentaires

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Bonjour et bienvenue dans le Gard (TGI de Nîmes),

En fait et à la place d'un "waouh" je cherche un arrêt qui s'adapterait à mon cas qui s'apparente, me semble t-il, à un déni de justice.

Prenons un simple exemple de 2 actions diligentées simultanément, l'une devant le TI en bornage judiciaire (compétence exclusive) et l'autre devant le TGI pour un problème d'empiétement qui serait, au surplus, reconnu par les défendeurs, l'action devant le TI ne servant, en fait, qu'à déterminer le "quantum" exact de l'empiétement.

Imaginons que je sois débouté de ma demande de bornage et que ma demande relative à l'empiétement se poursuive devant le TGI sur la seule reconnaissance dudit empiétement par les défendeurs.

Ben de toute évidence et à Nîmes vous (je) en seriez débouté.

Je pense donc faire l'objet d'une attention toute particulière des juridictions Nîmoises à mon égard et je cherche, mais vraiment, toute personne de bonne volonté pour m'aider dans ce difficile combat que je mène depuis maintenant 6 ans, avec la précision que je suis en appel devant la CA de...Nîmes (ben mince alors) que mon affaire sera clôturée le 23 mai prochain et que les défendeurs n'ont pas ccls. dans le délai imparti.

On pourrait croire que toutes les chances sont de mon côté, mais je puis vous assurer que non...

Help me !!!!

VBD.

CC

Bonjour,

Et comment interprêtez-vous cela :

Deux juridictions saisies simultanément, le TI au visa de l'article 640 CC et le TGI au visa des articles 545, 678, 1103, 1104 1217, 1221, 1222 et 2227 du Code Civi.

Dans le cadre de la procédure TI, la partie adverse avait soulevé in limine litis 2 exceptions de procédure (incompétence et connexité) mais en avait été débouté, le TI considérant à juste titre qu'il était seul compétent à statuer sur une question de servitude d'écoulement des eaux et qu'il appartenait au TGI de statuer sur mes autres demandes..

Ma procédure s'est donc terminée devant le TI (j'ai été déboutée) alors que ma procédure TGI poursuivait son "chemin" sur mes autres demandes.

Quelle "surprise" de me faire débouter par cette juridiction en m'opposant le principe de concentration des moyens tiré de l'autorité de la chose jugée (jugement du TI) ?

Elle n'est pas belle celle-là ?

VBD.

CC