Quelle est la marge manoeuvre du magistrat qui ouvre le dossier, et s'aperçoit que les pièces ne s'y trouvent pas, ou pas toutes ?

Il est tentant pour le magistrat de prendre la voie de la simplicité : je n'ai pas les pièces, donc je déboute !

Mais il existe plein de raisons pour lesquelles les pièces ne sont pas dans le dossier... même s'il est vrai que la plus fréquente est, non pas que le greffe ou le magistrat les ait perdues, mais que l'avocat a omis de les mettre.

Quoi qu'il en soit, toutes les hypothèses sont ouvertes, et il sera parfois difficile de prouver l'une ou l'autre.

Mais avec tout ça, on fait quoi de l'affaire ?

La décision n'est pas nouvelle, puisque la Cour de cassation avait déjà eu plus ou moins l'occasion de se prononcer assez récemment.

C'était, si ma mémoire est bonne, au visa de l'article 912, le magistrat ayant estimé que l'absence de remise du dossier ne permettait pas au juge de ne pas juger.

Ici, la cassation intervient, au visa de l'article 16 du Code de procédure civil, ce qui paraît assez logique (Civ. 2e, 20 septembre 2018, n° 17-24.856), la Cour de cassation considérant que "en statuant ainsi, sans inviter les parties à s'expliquer sur l'absence au dossier de pièces dont elle constatait qu’elles figuraient au bordereau de communication de pièces annexé aux conclusions d'appel de la caisse, et dont la communication n'avait pas été contestée par M. M., la cour d'appel a violé le texte susvisé".

Nous autres les avocats, apprécions ce type de décisions.

Ainsi, nous nous disons que si nous avons omis de mettre une pièce dans le dossier, ce qui peut évidemment arriver même en faisant attention, ou si la pièce est perdu par le magistrat (dans le train par exemple), et bien nous n'encourons pas une action en responsabilité.

Le juge demande alors la pièce à l'avocat, qui la lui fournit, et ainsi un jugement peut-être rendu et tout le monde est content (enfin, non, dans un procès, c'est quasiment impossible que tout le monde puisse être content).

Auteur: 
Christophe LHERMITTE

Commentaires

Il est effectivement quelques jurisprudences salvatrices.
En la matière, il est possible d'évoquer également les arrêts 14-19248 qui visait l’article 4 du code de procédure, 14-14798 qui visait aussi l’article 16, ou 15-21171 qui visait "l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis",
science que je ne dois qu'au fait de m'être trouvé confronté, comme beaucoup d'autres, à l'oubli de ces principes par des juridictions trop pressées face à un dossier que la photocopieuse avait amputé ...

Merci de ce rappel à l'heure où certains Magistrats pressés de rendre une décision en oublie les principes procéduraux . Comment expliquer au client que la pièce acquise aux débats et citées dans les écritures diverses soit considérée comme inexistante . Cela vient de m'arriver comme à d'autres Confrères Quimpérois . Le stress face à notre responsabilité possible est certes notre quotidien à nous Avocats .Cet article est donc bienvenu et salutaire ....
Et en dehors du droit à l'époque où lesMagistrats prônent la médiation pour tous litiges ,il serait bienvenu qu'un simple coup de fil ou message rpva nous informe d'une difficulté du genre avant la prise de décision.Evolution ,evolution robots et algorythmes .......

Nous sommes bien d'accord !

Bonsoir,
Je reste perplexe, mon frère a eu un jugement rendu en sa défaveur alors qu'il manquait 28 pièces à son dossier ! https://www.youtube.com/channel/UCO2AXAxopmHjaInvrfYrAwg, merci de l'aider.
Beausseron