La Cour de cassation rend une décision de bon sens, en tout point logique au code de procédure civile, et dont la solution était évidente.

Et pourtant, paradoxalement, sa publication est une bonne chose.

Non pas que le code ne soit pas clair sur le sujet, mais il apparaît que les avocats et le personnel de greffe rencontrent quelques difficultés avec ces notions procédurales fondamentales.

Un appelant forme un appel.

S'apercevant d'une erreur, il refait un appel.

Et que fait-il du premier appel ?

Il s'en désiste.

Evidement, et je n'aurais pas agi différemment, l'intimé se prévaut de ce désistement.

L'arrêt de la Cour de cassation est sans surprise, et il ne pouvait en être autrement (Cass. 2e civ., 21 févr. 2019, n° 18-13.467) :

« Attendu que Mme Y fait grief à l’arrêt, rendu sur déféré, de confirmer l’ordonnance par laquelle le conseiller de la mise en état avait donné acte à Mme Y de son désistement d’appel et de constater l’extinction de l’instance et le dessaisissement de la cour d’appel, alors, selon le moyen, que lorsque le désistement de l’appel est effectué en considération d’un second appel formulé différemment, il ne peut emporter renonciation à l’appel et acquiescement au jugement que si ce second appel est efficace ; qu’à défaut, il est non avenu ; que la cour d’appel a confirmé l’ordonnance par laquelle le conseiller de la mise en état avait donné acte à Mme Y de son désistement d’appel et constaté l’extinction de l’instance et le dessaisissement de la cour d’appel, en relevant que « d’ailleurs, cette “seconde déclaration d’appel rectificative” a été effectuée », tout en estimant que « la cour, saisie sur requête contre l’ordonnance du 12 octobre 2017, n’est pas compétente pour statuer sur la validité de la déclaration d’appel du 2 octobre 2017 à la demande de la SA Colas » ; qu’en faisant ainsi produire effet au désistement du premier appel, intervenu en considération du second, motif pris de ce que ce second appel avait été effectué, tout en se déclarant incompétente pour statuer sur sa validité, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 403 du code de procédure civile, ensemble les articles 405 et 397 du même code ;

Mais attendu que l’acte de désistement d’appel mentionnant être accompli en vue de la formation d’un nouveau recours, s’il n’emporte pas acquiescement au jugement et renonciation à l’exercice de ce recours, n’en produit pas moins immédiatement son effet extinctif de l’instance ; qu’ayant constaté que Mme Y avait indiqué s’être désistée de son instance d’appel, c’est à bon droit que la cour d’appel a constaté l’extinction de l’instance et son dessaisissement ; »

 

Soulignons toutefois que la Cour de cassation, dans cet arrêt publié, ne retient pas que le désistement emporterait acquiescement au jugement et renonciation à la voie de recours. Mais en tout état de cause, ce désistement qui est un incident d'instance mettant fin à l'instance... ne pouvait que mettre fin à l'instance, et aboutir donc au dessaisissement de la cour.

 

En l'espèce, force est de constater que la seconde déclaration d'appel était dépourvu d'effet, au sens de la jurisprudence de la Cour de cassation.

Son objet était de corriger l'erreur contenue dans la première déclaration d'appel qui avait saisi la juridiction.

Si l'instance introduite par cet acte d'appel s'éteint, il n'y a plus d'appel, et la cour est dessaisie.

Il est fortement conseillé de ne jamais envisager un désistement dès lors qu'il n'est pas prévu de mettre fin à l'instance d'appel.

Le désistement en appel doit être manié avec précaution, car c'est potentiellement explosif !

Auteur: 
Christophe LHERMITTE

Commentaires

Ce post méritait au moins un tweet, ce qui est fait !

Thierry, c'est l'autre, celui a réussi ;-)

Le petit Robert, c'est une valeur sûre !

Cher Thierry.

Cette décision est également l´occasion de rappeler que le désistement est parfait et acquis dès la notification au greffe des conclusions de dessaisissement d´appel et avant même que l´ordonnance constatant le désistement ne soit rendue, ce qui a pour conséquence de rendre inutile, vain, sans succès, désespéré, perdu d´avance, suicidaire, pathétique, vide de sens, incompréhensible, frustratoire, voué à l ´échec, non recommandable, superflu, stérile, futile, improductif, inefficace, oiseux,nul, superfétatoire, vide, infécond,négligeable... toute gesticulation de l´intimé en termes de conclusions quelles qu'elles soient.

Bien à toi.

Ps : j´ai acheté un Petit Robert...alors je m´en sers :-)